Les casques de la maison du roi

(1814-1830)

Partie II

La compagnie de gendarmerie des voyages, chasses et résidences du roi (1814-1816)

Créée par ordonnance royale de Louis XV, le 24 mars 1772, la Compagnie pour le service des Voyages et Chasses du Roi fait partie des Maréchaussées. Louis XVI augmente l’effectif de sa Gendarmerie, par ordonnances des 28 avril et 3 octobre 1778, partagent le Corps de la Maréchaussée en 6 divisions, la Compagnie des Voyages et Chasses étant versée dans la première de ces divisions.

Ses principales fonctions sont le service des Chasses ainsi que la garde des routes empruntées par le roi (principalement celles de Paris et de Fontainebleau). La Compagnie fait partie intégrante de la gendarmerie, son rang est immédiatement après celui de la gendarmerie.

La révolution fait disparaître l’ensemble des troupes de la Maison Militaire du Roi et ses différentes gardes, la Gendarmerie des Chasses est licenciée par l’article 1 er du titre VI de la loi du 16 février 1791.

La compagnie des Voyages, Chasses et Résidences

Lorsque Louis XVIII prend le trône en 1814, il rétablit le 11 juillet, la Compagnie des Chasses. L’ordonnance du 21 juillet et celle du 10 septembre 1815 réorganisent le corps, désormais la gendarmerie est organisée en 8 inspections et 24 légions divisées en escadrons, compagnies, lieutenances et brigades. Au sein de la première légion, seul un escadron est organisé, lui-même composé de deux compagnies : la première étant chargée du service des chasses, voyages et résidences royales ; la seconde est chargée du service de Paris et des arrondissements de la Seine.

La Compagnie des Chasses formait 30 brigades de 8 hommes, à sa tête 3 capitaines en premier, 1 capitaine en second et 5 lieutenants, soit un complet de 249 hommes. À partir du 23 octobre 1817, la Compagnie est commandée par un chef d’escadron.

La gendarmerie prenait la gauche des troupes de la Maison militaire du Roi et la droite des troupes de ligne, comme sous l’Ancienne Monarchie.

Pendant les Cent jours, la Compagnie des Chasses est remplacée par la Gendarmerie d’élite, comme sous le Premier Empire.

Les Cent jours

Au retour de l’île d’Elbe, Napoléon décide de reconstituer la Garde Impériale de sa Grande Armée, il charge le général baron Dautancourt de réorganiser la Gendarmerie d’élite avec la Compagnie des Chasses, ce qu’il fait à partir du 15 avril 1815 suivant les ordres du 14 avril du lieutenant général Drouot. Dans ses premiers rapports, le général Dautancourt constate que le complet de la compagnie n’est pas atteint : « sur les 240 hommes de troupe et 240 chevaux ; il manque à ce complet 15 hommes et 38 chevaux ». La Gendarmerie de la Garde Impériale se compose de deux compagnies.

La gendarmerie d’élite

À la seconde Restauration, la Compagnie de Gendarmerie des Chasses et Voyages du Roi est maintenue, mais en 1820, elle prend le nom de Corps de la Gendarmerie d’Élite.

L’ordonnance royale du 26 mars ordonne :

« Voulant donner à la Gendarmerie affectée au service de nos Chasses et Voyages, une organisation distincte et plus conforme à la nature des fonctions qu’elle est appelée à remplir dans nos Résidences royales ;

Avons ordonné et ordonnons ce qui suit :

La Gendarmerie de nos Chasses et Voyages prendra la dénomination de Corps de la Gendarmerie d’élite. Force totale du Corps : 240 hommes.

Une seconde ordonnance, datée du 27 avril 1820, décrit les fonctions que doit remplir le corps, entre autres : « La surveillance des châteaux et domaines royaux, et des routes que sa Majesté doit parcourir lors de ses voyages ; elle est également affectée au service des chasses du Roi… » ; le service de police du château habité par le Roi ; la sécurité des routes empruntées par le monarque ou les lieux visités ; la garde dans les résidences de Versailles, Saint-Cloud, Fontainebleau, Compiègne, Saint-Germain-en-Laye et Rambouillet ; la surveillance des parcs et forêts de la couronne ; le service des chasses ; assurer l’escorte du Roi et des Princes de la famille royale.

 Le Corps de Gendarmerie d’Élite est incorporé à la Garde royale, le 17 octobre 1821, mais ses fonctions restent inchangées.

La révolution de 1830

Pendant la révolution de 1830, la Gendarmerie d’Élite resta fidèle à son monarque, elle participe aux combats des journées de juillet et accompagne Charles X jusqu’à Cherbourg, aux côtés des Gardes du Corps, le Roi lui fit ses adieux à Valognes. Elle fut supprimée par ordonnance du 11 août 1830, portant licenciement de la Maison militaire et de la Garde royale, elle devient, à partir de cette date, la Gendarmerie départementale et la Garde Municipale de Paris.

Casque de la Gendarmerie des Voyages
modèle 1814

Gendarmerie Royale. Compagnie des Chasses
1819

Casque d’officier de la Gendarmerie des Voyages
modèle 1814

Le modèle 1814

Le casque modèle 1814 est l’un des plus typiques du faste retrouvé par la Monarchie sous la Restauration. D’inspiration étrangère (anglaise et russe), ce modèle se caractérise par une forme très haute, un cimier décoré de motifs originaux et d’une chenille terminée par une queue flottante.

Bombe en fer poli selon le règlement, mais sur la très grande majorité des casques parvenus jusqu’à nous, elle est en cuivre plaqué d’argent. Turban en peau de vache recouverte de peau de tigre ou de panthère. Plaque frontale en laiton estampé des Armes de France. Bandeau frontal en laiton, estampé de feuillages, de fleurs de lys et de l’inscription « COMPAGNIE DE GENDARMERIE DES VOYAGES CHASSES ET RÉSIDENCES DU ROI », seul un casque d’officier a conservé son bandeau d’origine, tous les autres exemplaires connus à ce jour possèdent le bandeau 1820 avec la nouvelle inscription. Jugulaires avec mentonnière, et rosace décorée d’une tête de lion. Cimier en laiton estampé d’un cor de chasse avec croissant et serpent entrelaçant une branche de chêne, dans le haut, d’une tête de Méduse. Chenille en crins noirs (écarlates pour les trompettes), elle occupe tout le dessus du cimier en redescendant, elle se termine en queue flottante.

Plumet blanc en plumes de coq, haut de 325 mm ; garni d’une petite tulipe en laiton.

La modification des Cent jours 

Pendant les Cent jours, la Gendarmerie de la Garde Impériale conserve les casques de l’ancienne Compagnie des Chasses ; lors de la revue du 23 avril 1815, les gendarmes d’élite sont coiffés du casque 1814, ce qui déplaît à Napoléon qui exprime le souhait qu’on le remplace par les anciens bonnets d’ours. Le général Dautancourt écrivit au commissaire ordonnateur en chef à Paris : « S.M.I. m’a ordonné à sa revue de dimanche (23 de ce mois), de faire reprendre, à la gendarmerie de la Garde, le bonnet d’oursin qu’elle portait autrefois. Ces bonnets, ainsi que leurs cordons, ayant été versés au magasin militaire de la rue de Vaugirard à l’époque de la dissolution de ce corps, j’ai l’honneur de vous prier d’autoriser le garde-magasin à me les remettre sous inventaire ».

Nous n’avons pas retrouvé d’archives sur la suite qui a été donnée à cet ordre, toutefois, il semble probable, que les bonnets en état d’être utilisés ont été remis en service. Cependant, certains gendarmes conservent le casque de la première Restauration, en supprimant la plaque frontale aux armes de France et en la remplaçant par un bandeau en laiton estampé d’une grenade. Lorsque l’Empereur arrive dans la région de Waterloo en juin 1815, il est escorté, entre autres, par cent huit gendarmes dont certains portent le casque 1814.

L’un de ces casques a été ramassé par un cavalier anglais du 7e régiment de hussards après la bataille. Ce casque fut ensuite exposé dans le musée du sergent Cotton. Lors de la dispersion de ce musée, en 1909, le casque fut obtenu par un avocat bruxellois, Maître Jambers, dont la collection a été achetée en 1952 par un brocanteur de Liège, Monsieur Gaston. Acheté par Monsieur Delacre, puis Golenvaux, tous deux belges, il fut vendu à l’hôtel Drouot en 1973.

Le modèle 1814 modifié 1820 

Le modèle 1814 est modifié en 1820, seul le bandeau frontal est changé, désormais il est frappé de l’inscription « GENDARMERIE D’ÉLITE », les autres parties restent strictement identiques.

Comme pour les casques des corps de la Maison Militaire du Roi, les coiffures d’officier de la Gendarmerie des Chasses et de la Gendarmerie d’élite, sont identiques aux casques de troupe. Leur finition est plus soignée, les garnitures sont surdorées (en laiton ou en cuivre), la chenille est plus fournie, parfois en ours, les mentonnières peuvent être entièrement brodées en fils cannetilles et sequins d’argent doré.

La modification de 1830

Pendant les journées insurrectionnelles de juillet 1830, la Gendarmerie d’élite resta fidèle au pouvoir monarchique ; après le départ en exil de Charles X, les gendarmes démontèrent la plaque frontale de leur casque frappée des armes de France. C’est pour cette raison historique que la plupart des casques existants nous sont parvenus incomplets.

Monsieur (1814-1830)

Les Gardes-du-comte d’Artois, petit fils de Louis XV, furent créés part l’Édit du 17 novembre 1773, pour la garde du Prince, alors âgé de seize ans, organisés en deux compagnies. Le Roi regardant le service que ces deux compagnies rendaient à son petit-fils, il les assimila aux troupes qui composaient les corps de Gendarmerie.

À la mort de Louis XVI, le comte de Provence avait été déclaré Roi, sous le nom de Louis XVIII et le comte d’Artois avait pris le nom de Monsieur.

Le 24 juillet 1814, Louis XVIII rendit une ordonnance rétablissant les Gardes-du-corps du comte d’Artois. Chacune des deux compagnies est composée de vingt-neuf officiers, cent-cinquante gardes, quatre trompettes et un piqueur. À cet effectif, quatre officiers, et cinquante gardes surnuméraires peuvent être recrutés mais sans solde ?

Les deux compagnies sont respectivement commandées par le comte d’Escars et le comte de Puységur.

Par ordonnance du 17 février 1815, les effectifs sont augmentés de 11 officiers, 50 gardes et 2 trompettes.

Pendant la période des Cent-Jours, la compagnie suit les Princes à Gand en Belgique ; ils sont envoyés en cantonnement dans la ville d’Alost. Lors du départ de Paris, l’organisation de la compagnie est loin d’être complète.

Lors du retour de Louis XVIII sur son trône, le monarque décide de licencier la compagnie le 1er septembre 1815, mais cette décision fut repoussée au 1er janvier 1816, puis par ordonnance du 25 décembre 1815 elle fut finalement maintenue mais réduite à deux compagnies de 79 officiers et gardes chacune.

Le 5 juin 1816, l’effectif est augmenté à 129 officiers et gardes. Le 24 avril 1819, les deux compagnies sont réunies en une seule.

À la mort de Louis XVIII, le 16 septembre 1824, les gardes-du-corps de Monsieur deviennent la 5ème compagnie des gardes-du-corps du Roi.

Ce corps participera à la guerre d’Espagne en 1823.

Gardes-du-Corps de Monsieur,
1815

Gardes-du-Corps de Monsieur
1820-1824

Le prototype de 1814

Le casque envisagé au début de la Restauration était un casque entièrement en métal argenté à l’exception de la plaque frontale en laiton doré représentant les armes de Monsieur. Ce casque n’ayant jamais été adopté nous ne le décrirons pas plus en détail.

Le modèle porté pendant les Cent jours 

Pendant la période des Cent jours, les gardes du corps de Monsieur sont dotés du chapeau en feutre, lors du départ de Paris pour Gand, ils sont équipés de casque de dragon de la ligne, en laiton avec bandeau de veau crinière en crins noir.

Le modèle 1816 

À leur retour en France un casque spécifique est fourni à la compagnie. Il est entièrement en cuir verni noir, avec cimier, plaque frontale, jugulaires, joncs de cerclage de la visière et du couvre-nuque en laiton doré. Nous pouvons suppose que la plaque frontale était estampé aux armes de Monsieur. Mais nous n’avons aucun document donnant plus d’information sur ce modèle.

Plumet en vautour blanc avec tiers inférieur à la couleur de la compagnie bleu de ciel pour la compagnie d’Escars, rose pour la compagnie de Puységur. Les officiers supérieurs ont une aigrette en plumes blanches de héron.

Le casque 1818 

À partir de 1818, environ, le casque est désormais avec bombe argenté.

La bombe, la visière et le couvre-nuque sont en cuivre plaqué d’argent, elle est de forme ronde. Le bas de la bombe, à l’avant, de deux grandes branches de lys en laiton doré. Plaque frontale aux armes de Monsieur en laiton doré. Jugulaires avec mentonnière à écailles, rosace ronde décorée d’une tête de méduse. Cimier à décor de branches de chêne et de fleurons. Chenille, en crins noirs (écarlates pour les trompettes).

Plumet en vautour blanc avec pied à la couleur de la compagnie.

Les officiers ont un casque avec certaines parties sur décorées, par exemple des écailles de mentonnières décorées de palmettes ou de moulures striées. La chenille en crin peut être remplacée par une chenille en peau d’ours.

Casque de Dragon Premier Empire
1814

Casque probablement d’officier
1818-1824

Un couvre-chef incommode

Les casques des compagnies de la Maison militaire du Roi évoquent le faste et le luxe retrouvés de la Monarchie, mais ne sont en aucun cas une protection efficace en temps de guerre.

Au delà de leurs brillants uniformes d’apparat, les troupes de la Maison du Roi laisseront un souvenir bien fade, face à la légende napoléonienne et aux aspirations modernes du milieu du XIX° siècle.

Boîtes de transport

Ces casques restent fragiles, ils sont livrés dans des boîtes de transport en bois laqué noir, doublé à l’intérieur soit de papier (le plus souvent rouge orangé) soit de veau ivoire.

À l’intérieur de cette boîte, la coiffure est placée dans un sac en toile ocre, de chaque côté de la brosse une plaque de carton vient épouser la forme de la brosse et se glisse entre les crins et les ailerons du cimier.

Boite de transport d’un casque de Gendarme

Boîte de transport d’un casque de Gardes-du-Corps du Roi

Les casques dans le collections publiques

Pour nos lecteurs désireux de voir ces modèles de casques, nous vous conseillons cinq principaux musées :

Le musée de l’armée à l’Hôtel des Invalides Paris. https://www.musee-armee.fr/accueil.html

Le château de l’Empéri à Salon de Provence, avec la prestigieuse collection Raoul et Jean Brunon achetée par l’État en 1967, propriété du musée de l’armée. https://www.salondeprovence.fr/bouger-et-decouvrir/chateau-de-lemperi/

Le musée royal de l’armée et d’histoire militaire, Parc du cinquantenaire à Bruxelles (Belgique) avec la collection Titeca visible sur rendez-vous. https://www.klm-mra.be

Le musée du fort de Joux à Pontarlier, qui possède une collection remarquable sur le sujet. http://www.chateaudejoux.com

Le musée Saint-Rémi à Reims. https://musees-reims.fr/fr/musees/musee-saint-remi/

Sources bibliographiques

  • Père Daniel, « histoire de la milice française », 1724.
  • Simon Lamoral Le Pippre de Nœfville, « Abrégé chronologique et historique de l’origine du progrès et de l’état actuel de la Maison Militaire du Roi et de toutes les troupes de France », 1734.
  • M.Boullier, « Histoire des divers corps de la Maison Militaire des rois de France », 1818
  • Journal Militaire Officiel 1820.
  • Eugène Titeux, « La Maison Militaire du Roi 1814-1830 », 1889.
  • Margerand, « Les coiffures de l’Armée Française », chapitre : « Les coiffures de l’État-Major ».
  • Commandant Pirot, “À propos d’un casque”, Bulletin de la Société Napoléonienne n° 48, septembre 1964.
  • G de Chamberet, “Précis Historique sur la Gendarmerie”, Dumaine et Jacquy 1861.
  • H. de Lattre, “Historique de la Gendarmerie française”, Léautey 1879.
  • Le Maitre, “Historique de la Gendarmerie”, Constant 1880.
  • Jean et Raoul Brunon, « Fiches techniques, UNIFORMES », fiche FGR 2.
  • Service historique de l’Armée de Terre (S.H.A.T), fort de Vincennes.
  • Archives Raoul et Jean Brunon, bibliothèque Raoul Brunon, Musée de l’Empéri.
  • Bertrand Malvaux “Les casques des Mousquetaires 1814-1816”, revue Tradition magazine N° 21 & 23.
  • Bertrand Malvaux “Les casques des Gardes-du-Corps du Roi 1814-1830”, revue Tradition magazine N° 29 & 33.
  • Bertrand Malvaux “Les casques des Gendarmes de la Garde 1814-1816”, revue Tradition magazine N° 61 &64.